Elle n’avait jamais été du genre élégant ou sophistiqué. A vrai dire, Robyn n’avait jamais été très fan des robes moulantes et talons hauts. En règle générale, elle était plutôt jean, polo et converses. En Australie, c’était plutôt bikini et robe légère ou mini short. Trop chaud pour autre chose. Robyn avait grandi en Louisiane, elle en connaissait un rayon sur la chaleur, l’humidité et tutti quanti. Fatalement, l’Angleterre était bien plus dépaysante que tout les autres pays qu’elle avait vus. Certes, elle n’en avait pas vu tant que ça. Elle pouvait les compter sur les doigts d’une main. Mais peu importait, ça ne changeait rien à son côté aventureux. Elle l’avait trop été, d’ailleurs, ces six dernières années. Ce qui l’avait conduite ici, à Londres, à se faire appeler par son deuxième prénom. Emmelyn. Elle l’avait en horreur. Sa grand-mère l’appelait ainsi, pour ne pas que l’on ‘confonde’ avec son cousin Robert, que tout le monde surnommait Robbie. Peu importait, sa grand-mère était morte des années plus tôt, et elle ne pouvait pas dire qu’elle l’appréciait vraiment. Quant à Robert, il s’était marié avec une pimbêche de son niveau mental et financier, ce qui expliquait aussi le fait qu’elle ne parlait pour ainsi plus à cette branche de sa famille paternelle. De toutes les façons, d’un côté comme de l’autre, Robyn avait toujours, plus ou moins, été vue comme le mouton noir, le vilain petit canard de la famille. Tout d’abord par son métier, qui n’en était pas un à leurs yeux, et ensuite par le fait qu’elle était partie, officiellement, travailler en Australie. Elle n’avait pas de petit ami, pas d’enfant, et semblait parfaitement bien le vivre. En réalité, elle le vivait très bien. Robyn n’était pas sûre qu’elle était franchement faite pour ça. Le mariage, les enfants, la vie de famille. Tous les jours, la même rengaine. Rien d’y penser, la jeune femme en avait des sueurs froides et des nausées. Cependant, fuir un dealer capable de meurtre n’était sans doute pas la vie dont elle avait rêvée. Mais à quoi s’attendait elle, en faisant cette immersion pour cet article ? Son patron n’avait sans doute pas imaginé toutes les implications, ni jusqu’où elle irait. Si elle lui avait dit la vérité, sans doute l’aurait il rapatriée en Louisiane au bout d’un an, comme convenu. Elle l’avait convaincu de la laisser une année de plus, puis une autre. Elle avait, au final, passé près de six longues années auprès d’un homme qui était en réalité un dangereux psychopathe. Et qu’elle détestait uniquement parce que ses victimes étaient les parents de Dexter. « La robe vous va ? » Robyn sursauta légèrement, sortant de ses pensées profondes. La blondinette jeta un regard critique à son reflet. Ladite robe était ultra moulante, à un point tel qu’on en voyait presque ses organes. Le genre de tenues qu’elle n’avait jamais mis. Mais dont elle allait devoir remplir sa garde robe. Peut être aussi changer de couleur. Sa période rousse lui avait bien plu. Elle fit une moue. Non, elle resterait blonde. Et elle ne mettrait cette robe que si sa vie en dépendait. Hélas, sans doute souvent. Mais pour l’heure, elle ne se sentait pas d’humeur à se séparer de son jean et de ses converses. « Oui, c’est parfait. Je la prends. » Ce qui ajoutait un énième paquet à son tas conséquent. Elle avait les moyens, de toute façon. Remerciant vaguement la vendeuse, elle quitta la boutique, estimant que cela suffisait amplement. Marchant tranquillement dans le centre commercial. Quel que soit le pays, l’attitude des gens dans ce genre de lieux restait la même. Robyn soupira, un peu lasse par cette longue journée. C’est alors qu’une tignasse châtain, dépassant légèrement, accrocha son regard. De tous les endroits, celui-ci était bien le dernier où elle se serait attendue à croiser, par le plus grand des hasards, Dexter. Elle aurait pu courir. Oui, absolument. Mais une grande flemme s’était soudainement emparée d’elle et elle lâcha un tonitruant « DEXTER ! » qui poussa à peu près tout le monde à se tourner vers elle. Y compris et surtout le principal intéressé. Posant les paquets à ses pieds, Robyn croisa les bras en lui faisant un grand sourire, très fière d’elle-même.

Flâner dans un centre commercial, ça n'est pas son genre. Pire, le shopping, il déteste ça. Le brun n'a pas l'habitude de se mêler aux gens dans ses endroits, prêt à dépenser des centaines de livres pour un simple vêtement, très peu pour lui. Il est vrai que le jeune homme aime porter des vêtements qui sont à son avantage. Sans pour autant déverses des sommes astronomiques pour pouvoir sortir le soir. Et faiblir face à des petits prix n'est pas son genre. Les mains dans les poches, son regard se pose sur chaque magasin, l'analysant rapidement. Dexter n'est pas là pour lui mais pour Pandora. Son anniversaire approchant ainsi que leur petite fête de cadavres, celui-ci se doit de lui acheter un cadeau. Sa meilleur amie est devenue l'une des personnes les plus importantes et le brun a envie de lui faire plaisir, surtout depuis qu'il sait ce qui attend la jeune femme dans quelques semaines maintenant. Un enfant. Son demi-neveu si l'on considère la chose comme ça. Un bébé. Une naissance lui parait vraiment étrange dans son monde à lui. Une lueur d'espoir dans un tunnel déjà bien trop ténébreux. Dexter sourit à l'idée de voir Pandora tenir dans ses bras un bébé. Le voilà planter devant un magasin de... lingerie féminine ?! Ouvrant les yeux un peu plus, le brun commence à se détourner quand une vendeuse lui attrape le bras et l'entraine à l'intérieur. Bonjour monsieur ! Vous êtes ici pour votre petite-amie ? Votre fiancée même peut être ? Je peux vous proposer tout un tas d'ensemble allant des sous-vêtements sobres aux plus coquins si vous le désirez et aussi... Se détachant de l'étreinte exagérée de la femme, Le brun ne peut s'empêcher de sourire malgré lui. Non, je ne suis pas là pour ça, je me suis égaré. Mais merci, je saurai que si j'ai besoin de me faire agresser par une femme la prochaine fois, je vous rendrai visite ! Aurevoir ! Sortant de la boutique, Dexter se passe une main sur la nuque tout en soupirant. Certains vendeurs sont prêt à tout pour vendre. Même à attirer les gens qui n'ont rien à faire ici. Se concentrant à nouveau sur les magasins, une voix surgit de derrière lui, une voix familière et inattendue. Une voix qu'il ne pensait ne plus jamais entendre. Son coeur rate un battement quand il se retourne et voit cette silhouette si souvent vu ces dernières années s'approcher en courant de lui. Un sourire vient se coller à son visage et quand celle-ci se retrouve en face de lui, il peut s'avouer qu'il ne rêve pas. Robyn. Dexter lui sourit. Sa jolie blonde est là, en face de lui. L'une des seules à savoir tout -ou presque- de lui. Sans penser à mal ou à l'ignorer. Et sans attendre, le brun l'a prend dans ses bras, laissant ainsi tout ses mois de souffrance en solitaire se fissurer dans les bras de son amie. Tu m'as manquée, idiote. Dexter inspire, sentant à nouveau le doux parfum de Robyn, celui qu'il n'a jamais vraiment oublié. Le jeune homme desserre son étreinte et lui sourit à nouveau. Désignant un banc à l'écart, il l'entraine avec lui. On sera plus tranquille là bas. Je ne m'attendais pas à te revoir... ici. Ni jamais. Comment as-tu où j'étais ? Autant être sincère, en partant d'Australie, il se doutait ne plus jamais revenir et revoir ceux qui ont composés son passé. Comme Yellowsky lui a bien démontré avec l'arrivée de Marla, Ludivine et Shane dans sa vie. Au retour de son dealeur dans son esprit, il tourne la tête vers Robyn. Tu l'as vu ? Il est ici lui aussi... Pas besoin d'être explicite, elle comprendra. La blonde le comprend toujours.

Dexter lui sourit lui aussi, répondant au sourire radieux qu’elle lui faisait. Avant de combler l’espace entre eux pour la serrer contre lui. Il était grand, vraiment, et elle se sentait encore plus minuscule face à lui. Et d’autant plus fragile qui la serrait contre lui presque à l’étouffer. « Toi aussi, tu m’as manqué, andouille. » Robyn ne pouvait cesser de sourire. Ne pas sourire quand Dexter était en face d’elle était tout bonnement inconcevable. Vous n’auriez pas envie de sourire, vous, face à une bouille pareille ? La blondinette, elle, ne parvenait pas à faire autre chose. Il l’entraina à l’écart, sur un banc. « Je ne le savais pas. Enfin, je savais que tu étais quelque part à Londres. Mais Londres, c’est grand, mine de rien. Bref. J’essayais de me cacher un peu, de me faire oublier. Tu vois le genre… » Elle roula des yeux, comme pour exprimer un peu plus sa pensée. Mais son sourire ravi s’effaça bien vite. Il. Inutile que Dexter ne prononce son nom. Elle savait pertinemment de qui il parlait. Shane. A croire que des milliers de kilomètres n’avaient pas suffi, qu’il était assez fou et acharné pour les avoir suivis ici. Mais après tout, si elle avait pu le retrouver, pourquoi pas Shane, qui avait des ressources quasi illimitées ? Certes, mais il n’avait pas non plus son intelligence, son esprit déducteur de Sherlock Holmes. Loin de là. « Non, je ne l’ai pas vu. A vrai dire, j’avais espéré, vainement semble t’il, qu’il ne te retrouve jamais. » Robyn soupira. Ce cauchemar ne s’arrêterait il donc jamais ? « Je suis tellement désolée, Dexie… C’est entièrement ma faute… J’aurais du voir ce qu’il mijotait ! Je veux dire, je vivais avec lui, j’aurais du savoir ! Si j’avais été plus attentive, plus maline, rien de tout cela ne serait arrivé… » Si elle s’était comportée correctement, c'est-à-dire comme une journaliste, une vraie, pas une midinette prête à se laisser embobiner par le premier venu au sourire un peu trop craquant, Dexter aurait encore ses deux parents. La jeune femme posa la tête sur l’épaule de son ami, soudainement très lasse. Lui pardonnerait il un jour ? Robyn l’espérait très sincèrement. Mais elle n’en était pas totalement sûre, et c’était pour cela qu’elle n’osait pas relever la tête pour croiser le regard de son Dexie.

Retrouver Robyn ici, après que sa vie se soit transformé en une sorte de machine infernale est une sorte de bénédiction pour Dexter. Sa blonde, sa seule et unique amie envers qui il n'a jamais eu à mentir. La seule qui a vu les deux Dexter sans paniquer devant tant de contraste. La seule qui arrive encore aujourd'hui à lui rendre le sourire malgré le poids sur son coeur et ses épaules. Il l'a sert fortement, cherchant à l'ancrer comme lui pour toujours. Dexter n'est pas amoureux d'elle. Mais c'est forcément ce qui s'en rapproche le plus. Cette envie de rester avec elle tout le temps et de la regarder, voir ses étoiles de malice flotter dans ses yeux et pouvoir passer sa main dans ses cheveux sans avoir peur des conséquences. Une amitié avec des extras. Mais Robyn n'est pas ordinaire. Elle est beaucoup mieux que ça. Il desserre son étreinte pour mieux la regarder. Elle n'a pas changée. Ses cheveux blonds sont toujours aussi doux, ses yeux toujours aussi pétillants et son sourire, toujours aussi grands, comme le brun se souvient. Et sa répartie surtout. Dexter sourit encore plus et se retient de la prendre à nouveau dans ses bras. Une sensation d'apaisement se fait ressentir, sensation qu'il ne ressent que très peu souvent. Seulement quand il joue du violon ou quand il est en compagnie de certaines personnes. Mais tu m'as quand même retrouvée. Malgré tout. Tu es un véritable miracle à toi toute seule Robyn ! Passer une journée simple avec elle lui convient. Dexter en a envie et si pour cela, il doit mettre entre parenthèses sa recherche de cadeau pour Pandora, il le fera. Car sa blonde n'est pas n'importe qui. Mais son sourire disparaît en parlant de lui. Ce gars qui semble hanter chaque rêve de Dexter et peupler sa journée. Au point d'en être obsédé. C'est une horreur et le brun voudrait bien s'en passer. Oublier son regard d'acier et ses piques, ses paroles cruelles. Et tant que Robyn ne l'a pas vu, le jeune homme ne peut qu'en être heureux. Le plus loin elle sera de lui, le mieux se sera. Pour chacun d'entre eux. Il me retrouve toujours, tu le sais bien, non ? On dirait une promesse de vieux conte de fée mais malheureusement, c'est tout autre. Il est comme mon ombre et je ne peux pas lui échapper. Sur ses paroles, son regard se fait plus noir et ses poings se serrent légèrement. Une véritable obsession qui le bouffe intérieurement. Comme les produits qu'il s'injectait avant. Lentement mais surement, ils te prennent les veines, le coeur et l'esprit. Si bien que rien ne peut arrêter l'envie et le besoin. Surtout, ne remets pas la faute sur toi. Si le blâme est à porter, c'est sur lui et moi. Nous sommes fautifs mais tu n'aurais pas pu savoir. Son visage angélique et sa façon de faire, de tout cacher. Il n'est pas simple de le confondre avec un serial killer. Il fait déjà son effet ici. Robyn, tu n'as absolument pas besoin de t'en vouloir. Tu étais là pour lui et pour moi, on dépendait de toi tous les deux et il en a joué en te prenant pour une idiote. Tu ne l'es pas et tu ne le seras jamais. Un sourire tente de forcer le trait fin de ses lèvres mais inutilement. Sentant la tête de la blonde se poser sur son épaule, Dexter entoure ses épaules de son bras et pose sa tête sur la sienne. Comme si cette dernière année n'était jamais arrivée et qu'ils étaient encore sur le sable fin d'Australie a regarder les vagues au loin. Le jour où je t'en voudrais, c'est seulement si tu touches à un seul de tes magnifiques cheveux blonds ! Garde les toujours comme ça, ils sont parfaits. Dexter lui sourit doucement, cherchant à reprendre contrôle de cette colère qui le ronge petit à petit, créant ces pensées qu'il souhaiterait voir disparaitre. Ses envies qui l'embrouille. Parles moi de toi. Que t'est-il arrivée ses derniers mois ? Robyn a trouvée son Batman, enfin ? Il ricane comme un ado puis repasse à la contemplation de ses cheveux, source infini de douceur.

Si seulement il savait à quel point elle avait merdé. Sans doute n’aurait il pas pensé qu’elle était un tel miracle. Cependant, sans vantardise aucune, il fallait bien avouer que Robyn s’était plutôt pas débrouillée sur ce coup là. Pour la première fois depuis longtemps, la chance lui avait enfin souri. Mais clairement, ça n’allait pas durer. Pas avec Shane dans les parages. Robyn soupira. Souvent, elle s’était demandé si elle ne devait pas commettre l’irréparable. Tuer Shane, pour retirer du pied de Dexter l’épine qu’il représentait. Tout aurait été bien plus simple. Au fond, cela n’importait pas tant si elle devait passer le restant de ses jours en prison pour cela. Ce serait toujours mieux de voir le sourire dans les yeux de son ami, et pas la douleur constante. La jeune femme le regarda soudain. Bien que subitement énervé, les pupilles dilatées, Dexter n’avait pourtant jamais eu aussi bonne mine. Comme si… Comme s’il avait arrêté, enfin, de se droguer. Robyn étouffa un soupir. Si longtemps loin d’elle et il était un autre homme. Bien meilleur. Un instant, elle songea qu’elle ferait sans doute mieux de disparaitre une nouvelle fois de sa vie. Pourtant, il ne l’envisageait pas un seul instant et d’ailleurs, elle non plus. « Je suis plus naïve que tu ne le penses, tu sais… » marmonna t’elle. C’était son boulot de fouiner partout, et elle était pourtant incapable depuis déjà trop longtemps. Elle haussa un sourcil. Elle doutait fortement que Shane ait, à un quelconque moment, dépendu d’elle. Ce serait bien la meilleure de l’histoire. Mais peu importait désormais, tout était loin derrière eux à présent. Il était allé de l’avant et, maintenant qu’elle l’avait retrouvé, elle pouvait en faire de même. Malgré l’ombre menaçante de Shane dans leurs deux vies. Ensemble, ils seraient plus forts et le grand brun ne pourrait guère les atteindre. Il restait une ou deux facettes de Robyn inconnues des deux hommes et elle savait qu’aucun des deux n’aurait jamais envie de la connaitre, car cela serait nécessairement de la manière forte. « Mes cheveux ? Est-ce que tu te fiches de moi, Dexter Soulman ? » lâcha t’elle en éclatant de rire. « Premièrement, si j’ai envie de raser mes cheveux ou de te les teindre en roux, tu n’auras pas ton mot à dire. Deuxièmement… » Elle fit une pause, pensive. « Il n’y a pas de deuxièmement. » dit elle fièrement avec un grand sourire. « Je n’ai pas le temps pour ce genre de conneries, de toute façon… » marmonna t’elle, perplexe. Elle jugea préférable de taire le fait qu’elle coupait elle-même ses cheveux, il était capable de crier au scandale après une telle apologie de ses cheveux. « Dexie ! » Elle lui colla un coup de poing sur le bras. Le jeune homme dut à peine sentir la douleur, alors qu’elle avait l’impression de s’être brisé tous les os de la main et du poignet. « Il faut que tu oublies cette vanne immonde de Batman et Robin. Vraiment. » Toutefois, sa question était légitime. Robyn n’avait pas réellement eu de petit copain en Australie. Tout au plus, quelques relations d’une nuit ou deux, savamment cachées à Shane. Avec le recul, après la mort des parents de Dexter, la jeune femme réalisait qu’elle avait eu plus que raison. Et ici, à Londres, on ne pouvait pas exactement dire qu’elle avait le maximum pour rencontrer quelqu’un. Elle aurait pu. Elle aurait du, même. Dexter ne pourrait pas être le centre de sa vie pour toujours. Il ne le voudrait pas. Il finirait par la pousser vers les autres, et Robyn préférait encore le faire d’elle-même. Elle avait sa fierté, la blondinette, que diable ! « Eh bien… J’ai redécouvert les sous vêtements, en dentelle notamment. Parce qu’en Australie, je t’avouerai que je passais ma vie en maillot de bain. Et puis sinon, rien à l’horizon. Les Américaines ne doivent pas être du goût des Britanniques. Pourtant, j’adore leur accent, tu n’as même pas idée ! »